Le Marathon d'Halloween 2016

Le Marathon d'Halloween 2016

Messagepar Greenheart » Dim 16 Oct 2016 18:30

Et c'est reparti pour un tour !
...en espérant qu'aucune nouvelle inondation ne frappera mon quartier :mrgreen:

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L’Halloween de l’Horloger


Un tic-conte-toc d'Halloween pour tout public de Doug Greenheart, alias David Sicé.



Taddeus Krone jeta un regard soucieux à travers le carreau de son atelier au troisième étage de la petite tour. Le soleil allait se coucher sur la montagne toute proche, jetant ses derniers feux embrasés en direction du petit bourg déjà plongé dans les ténèbres de l’orage menaçant.

Zacharia, le jeune apprenti du vieil horloger s’approcha : il avait terminé de ranger, et estimait avoir le droit de se montrer curieux. Se pouvait-il que le garçon ait le même curieux pressentiment de son aîné ? Ou alors c’était simplement le vent froid de l’orage qui s’insinuait par les fentes et les tuyaux qui l’inquiétait… Pourtant le cliquetis léger des rouages du garçon paraissait aussi régulier qu’au premier jour où Taddeus l’avait mis en marche, et le vieil horloger se rassura, au moins sur ce point.

En contrebas, les bonnes gens se hâtaient de traverser la grand-place pour rentrer chez eux et échapper à la terrible pluie qui s’annonçait, engoncés, raides et saccadés . En levant les yeux, c’était les façades étroites aux fenêtres illuminées de tous leurs arcs électriques, et c’était la multitude des toits pointus, leurs hautes cheminées, les clochers et clochetons – tous bleus de pénombre, ourlés de l’or du couchant. Le tonnerre se mit à gronder sourdement.

« Pardon ? » demanda Taddeus, car Zacharia lui avait dit quelque chose mais il n’avait rien entendu. Le vent gémit plaintivement et le bois de la tour se mit à craquer.
« Est-ce que ce sera bientôt la nuit de la petite lumière des Raves ? »

Une première grosse goutte de pluie glacée s’écrasa contre le carreau, et Taddeus s’écarta vivement de la fenêtre : « Non, non, il faut encore deux semaines… Tu devrais dormir dans l’atelier et non dans ton appentis cette nuit, et garde quand même la toile cirée sur toi. »
« Merci Maître Krone ! », répondit le garçon, reconnaissant.

Un éclair zébra le ciel. Taddeus s’approcha à nouveau du carreau : la grand-place était complètement déserte et tous les volets fermés. Taddeus soupira et alla lui-même tirer sur le levier voisin, et tous les volets de l’atelier se refermèrent avec un grincement. Les arcs électriques orangés du lustre vacillèrent, puis s’éteignirent. Souriant à l’intention de Zacharia, Taddeus leva l’index et éclaira devant lui avec la petite flamme bleue qui jaillissait de son doigt. Le garçon imita le vieil horloger et alla descendre de quoi dormir dans l’atelier, allumant les veilleuses disposées en hauteur tout le long de son trajet – qu’il n’oublierait pas de soigneusement éteindre une fois qu’il n’aurait plus rien à porter.

Le crépitement fort de la pluie drue descendit sur eux. Taddeus se retira dans ses appartements, grimpant avec précaution l’étroit escalier de bois aux marches hautes. Il s’emmitoufla dans son lit-placard, éteignant les arcs électriques de la petite chambre en tirant sur le cordon de gauche, tandis que les coups de tonnerre se succédaient tout autour de lui.

Taddeus savait bien quelle nuit était cette nuit. C’était la nuit de tous les Saints, la veille de la Toussaint – la nuit de Samain. Le vieil horloger ne craignait pas les Sorcières : elles haïssaient la ville et ses habitants : elles étaient persuadées que les choses n’avaient pas d’âmes, et à leurs yeux, ils n’étaient que des choses. Comme tous les pillards des alentours, elles redoutaient de finir brûlées vives, ou broyées par les gardes. Non, ce que Taddeus craignait par-dessus tout c’était…

Des coups sourds à sa porte. Personne ne bougeait dans la maison, et les coups continuaient. Taddeus Krone se leva, ouvrit la lucarne du premier étage, au-dessus, sur le côté du porche. L’homme releva la tête, et malgré la pluie battante, retira son capuchon détrempé tandis qu’un éclair illuminé son visage blafard et barbichu. Le cœur du vieil horloger donna un grand coup.

Taddeus referma vivement la lucarne, et resta un temps immobile. Comme l’homme continuait de tambouriner, Taddeus descendit et alla lui ouvrir.
« Que fais-tu là, Samuel ? Tu es trempé, tu vas attraper la mort et me donner la rouille ! Suis-moi, je vais te donner des vêtements secs… »

Ils s’étaient assis à côté de la cheminée et Taddeus avait fait un feu. L’homme, grand et maigre, aux cheveux de cuivre accepta le thé chaud, le pain et la confiture, et s’étonna : « Vous n’avez pas changé ! Vous ne changez jamais… »
Le vieil horloger répondit, agacé : « Je change, Samuel : quand mon visage est trop vieux, je le change, voilà tout. Comment va ton père ? Sait-il que tu es à Glockenburg ? »

Samuel répondit sèchement : « Ton petit-fils est mort il y a dix ans… »
Taddeus se raidit : « De quoi as-tu besoin ? »

Samuel se leva : « Je n’ai pas besoin d’or, ni d’argent, ni aucune autre monnaie, Grand-Père. »
Taddeus s’affaissa légèrement et demanda d’une voix plus basse : « Alors de quoi ? »

Samuel eut un geste énervé : « Vous tous, vous n’êtes qu’une vieille horloge oubliée dans la montagne ! »
Taddeus se leva à son tour, furieux : « Comment peux-tu oser… ! »

Mais son arrière-petit-fils ne s’était pas arrêter de parler : « Vous croyez pouvoir tout ignorer du monde mais… »
Taddeus haussa le ton : « Et le monde nous ignore, et c’est très bien comme cela ! »

Samuel prit le vieil homme par les épaules : « La guerre arrive, Grand-Père, et ils vont tous nous tuer – tes petits-enfants survivants et les enfants de leurs enfants ! Glockenburg est une armée ! Tes soldats pourraient brûler tous nos ennemis, toutes leurs armes et toutes leurs maisons – et tous nous sauver ? »

Taddeus se dégagea des bras de l’homme, et répondit avec colère : « Et brûler leurs femmes et leurs enfants avec ? »
Samuel répondit sans se troubler : « C’est la guerre, ce sera eux ou ce sera nous ! »

Alors Taddeus se fâcha considérablement : « La ville du Diable ! », le vieil homme criait, « Les Rouages de l’Enfer ! Voilà comment les tiens nous appellent ! »
Puis il ajouta tout bas : « …La peste de métal ! »

Samuel répondit, regardant droit dans les yeux le vieil homme : « Et tout cela changera, si vous arrêtez leurs troupes. De toute manière vous y serez un jour forcé. Mais ce jour-là, nous serons tous morts. Cela vous est donc égal ? »

« Non… » répondit sourdement Taddeus. Le tonnerre roula dans le lointain comme pour ponctuer sa réponse. Puis le vieil homme reprit : « Toi et ta famille pouvez venir vous installer à Glockenburg... Nous vous protègerons. Et comme tu peux le constater, nous avons continué à faire notre le pain.

Samuel poussa un long soupir : « Merci, mais nous ne voulons pas finir empaillés et articulés comme toi et les tiens. Nous voulons vivre dans le monde, avec nos voisins, et voir nos enfants grandir et faire des enfants à leur tour et qu’ils puissent courir le monde à leur tour et non se murer dans… »

Taddeus se fâcha à nouveau : « Tu veux vivre dans le monde ? eh bien le monde c’est la guerre ! Tu veux voir tes enfants grandir et courir ? Eh bien grandir et courir c’est aussi devenir soldat et mourir. Fais ce que ton père et ton grand-père ont fait tout le temps que les horloges de Glockenburg ont tourné en rond, pendant tout le temps que nous avons survécu… »

« Vous n’avez pas survécu ! » cria Samuel : « Vous n’avez jamais été vivants ! »

En un éclair, le vieil horloger avait saisi le bras de son arrière-petit-fils et l’avait tordu, forçant l’homme à descendre l’escalier et le mettant à la porte. L’orage s’était calmé mais pouvait reprendre à tout moment. Taddeus jeta son manteau à Samuel : « Repars d’où tu viens, et ne te remontre pas, car par devant le Ciel je le jure, ce ne seront pas des friandises qui t’attendront mais les plus mauvais tours ! »

Samuel ne revint jamais frapper à la porte du vieil horloger. Ce n’est que vingt années plus tard que Taddeus entendit à nouveau parler de son petit-fils : deux jeunes randonneurs, Alexis et sa sœur Michaela, qui venaient d’Amérique et qui avaient retrouvé dans un livre de la bibliothèque une lettre à Samuel mentionnant l’adresse de Taddeus.

Ignorant la plus grande part de l’histoire de leur famille, ils avaient voulu se rendre à Glockenburg, ce qui n’avait rien eu d’évident à cause des routes coupées par les avalanches. Les deux jeunes gens trouvaient la ville « magique », comme oubliée par le Temps, et étonnant que Taddeus ressemble à ce point à une gravure du 19ème siècle représentant son ancêtre – et qu’il soit horloger comme lui.

Comme il feuilletait le vieux livre relié que lui avait amené les deux adolescents, Taddeus demanda, l’air de rien : « Et Samuel, qu’est-il devenu ? »

Son cœur donna un léger coup quand il entendit la réponse, et ses paupières se plissèrent douloureusement. Mais aucune larme ne lui échappa, ce qui était bien normal, car il ne pouvait pas pleurer.

LA TIC-FIN-TOC.

Achevé le 16 octobre 2016.
Texte et illustration tous droits réservés David Sicé .
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Re: Le Marathon d'Halloween 2016

Messagepar Greenheart » Dim 16 Oct 2016 19:42

Une petite rediff, mais comme c'était de toute manière une avant-première :mad2:

***

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TOUS DES BÊTES


... une très horrible nouvelle fantastique de David Sicé.


Pour adultes et adolescents.



Natacha arracha l’ourse en peluche des mains du bambin, qui se mit aussitôt à pleurer à chaudes larmes. L’assistante de maternelle ne comprenait pas, et même s’indignait : « Comment pouvez-vous faire des choses pareille ? »

La jeune femme, qui avait ramassé son fils d’une main et son cabas de l’autre, fit volte-face, vociférant pour couvrir les pleurs du petit bout-de-chou, qui montaient désormais, un peu à la manière d’une alarme incendie : « Non ! Comment pouvez-vous faire une chose pareille ! Les ours sont des bêtes sauvages : ils mangent les gens, ils mangent les enfants, et ils commencent par leur visage et après ils leurs arrachent la peau du ventre et leur dévorent les intestins en tirant dessus, alors qu’ils sont encore vivants !!! »

Les petits enfants encore présents dans le couloir de la maternelle se mettaient à pleurer à leur tour, et la professeure des écoles, Lisa-Beth, voyant venir le moment où l’assistante de maternelle en collait une à la parente d’élève, intervint en tirant la dame par la manche de sa blouse : « Laissez tomber Raïssa, vous voyez bien que c’est une folle… »

Outrée, Natacha quitta les lieux sans plus attendre, regagna son énorme quatre-quatre parqué sur le trottoir et démarra en trombe, manquant d’écraser une autre maman et son bébé. La maman l’insulta copieusement, mais on n’entendait rien à travers les vitres épaisses. À l’arrière, le bambin soigneusement attaché s’était instantanément calmé, suçant sa compote de pommes et le bavoir tâché qui lui tenait lieu de doudou sur les genoux.

***

Natacha soupira, puis alla se garer sur le parking du collège de sa fille aînée : elle n’en avait pas terminé avec sa journée. Elle prit le temps de vérifier son maquillage, de récupérer un livre de poche tout corné dans la portière ; puis, poussant son bébé soigneusement ceinturé, l’air farouche et décidée, elle ignora superbement le surveillant censé empêcher les gens de passer le portail, et alla droit en direction de la salle des professeurs, où elle était censée rencontrer la professeur de français et professeur principale de Chloé.

Personne ne l’arrêta. Dans le hall, Natacha faillit même se retrouver face à la Conseillère Principale d’Éducation, qui en l’apercevant tourna des talons et courut se réfugier dans son bureau. Natacha entra dans un grand bang, celui de la lourde porte heurtant violemment le mur du côté des casiers des professeurs.

Émile Leroux, professeur de sport grand et baraqué dans la force de l’âge, crut d’abord que c’était l’un de ses c…rds de quatrième qui avait osé ouvrir la porte d’un coup de pied – mais réalisant son erreur, fit un bond arrière pour éviter de se faire rouler dessus par la poussette. Natacha alla droit sur la professeur de français et la gifla avec le livre de poche – un exemplaire de l’œil du Loup de Daniel Penac.

« Comment, hurla-t-elle de sa voix qui montait dans les aigus au point de vous coller une migraine pour le reste de la soirée et même la nuit qui suivait, osez-vous faire lire ce torchon répugnant à vos élèves ? »

Et sans laisser le temps de répondre à la professeur de français, qui réalisait en tremblant qu’elle avait désormais la lèvre fendue et saignait, Natacha reprenait, véhémente : « Les loups sont des monstres : ils vous déchireraient les tendons d’Achille pour vous empêcher de courir ! ils vous arracheraient la gorge la gorge, et pendant que vous pisseriez le sang à cinq mètres, ils vous fourreraient le museau sous la jupe pour vous arracher… »

Mais Natacha se sentit soudain prise à bras le corps et soulevée. Elle avait beau crier et gesticuler, Monsieur Leroux l’emmena ainsi jusqu’au portail et la jeta dehors, tandis que le surveillant s’empressait de refermer derrière Chloé, qui poussait désormais son petit frère. La jeune fille mortifiée s’excusa du regard.

Dans la salle des professeurs, la professeure de français sanglotait, tandis qu’une collègue lui tendait de nouveaux mouchoirs en papier pour remplacer ceux tout sanguinolent qu’il fallait jeter. À l’entrée de la salle des professeurs, la Conseillère Principale d’Éducation remarquait que la parente d’élève ne lui avait pas cassé de dents, il ne fallait donc pas en faire un drame. Et comme on lui montrait le livre de poche, elle ajouta que ce n’était pas un si bon livre que cela, et que s’il choquait un parent, il valait mieux le retirer de suite des cours et du centre de documentation.

***

Remontée dans son quatre-quatre, Natacha reprit sa respiration ; se recoiffa ; ordonna à sa fille de vérifier si elle s’était bien attachée et si le petit Nicolas l’était aussi. Puis elle démarra. Le parking et la route étaient désert à présent que le dernier car scolaire avait quitté les lieux. Et comme le quatre-quatre montait le long de la colline le long de la route qui serpentait, toute bordée d’arbre épais, la nuit tombait peu à peu.

Ils passèrent le grand portail du lotissement. Puis le portail beaucoup plus haut, solide et garni de pointes de leur propriété. Puis ils attendirent que la porte du garage se soulève complètement, avec son gyrophare et son alarme bruyante dont les voisins se plaignaient à l’autre bout du lotissement. Puis, une fois dans le garage illuminé, ils attendirent que la porte redescende. Natacha prit alors bien garde de regarder de tous les côtés, dans les rétroviseurs et sur l’écran des caméras arrières. Enfin, mais en gardant la main serrée sur la poignée du grand couteau qu’elle cachait dans son sac à main, elle descendit et autorisa Chloé à défaire sa ceinture de sécurité et celle de son petit frère.

Arrivait le meilleur moment de la journée, celle où après s’être assurée que Chloé était bien à faire ses devoirs et Nicolas dans son parc, elle préparait à manger pour ses enfants, et pour son mari, qui rentrerait plus tard. À cet instant, tous les gestes de la jeune femme étaient apaisés. Le micro-ondes lancé, elle fit le tour du salon pour s’assurer que tous les volets électriques étaient bien descendus. C’était le cas.

Alors elle prit la direction de la chambre de Nicolas, qu’elle baignerait brièvement avant de nourrir. Un souffle de vent froid souleva une mèche de ses cheveux. Natacha s’arrêta net, et pivota lentement. Elle rebroussa chemin. Sentit de nouveau le vent froid, cette fois sur ses jambes et ses bras nus… Son cœur sauta un battement : le vent froid venait de la porte close de la chambre de Chloé.

Natacha sentit la colère monter : elle avait pourtant dit à Chloé de ne jamais fermer la porte de sa chambre, et de ne jamais ouvrir la fenêtre sans son autorisation. Et si sa fille attrapait bêtement un rhume ? Avec le concours de danse pour dans deux jours, ce serait la catastrophe : on n’a jamais vu une ballerine qui renifle et avec des yeux rouges… Natacha ouvra grand la porte, mais l’admonestation cinglante s’étrangla dans sa gorge.

Le loup, grand, décharné, la gueule couverte de sang et de lanières de chair releva la tête de son festin et le fixa de ses deux beaux grands yeux dorés.

Natacha referma la porte et courut jusqu’à la porte – grande ouverte – de la chambre de son petit Nicolas. Indemne, dans son parc, le tout petit garçon était aux anges et babillait, essayant de caresser le très joli ourson bien vivant qui se roulait sur le matelas…

La mère de l’ourson balança alors un coup de pattes magistral en pleine figure de Natacha, et, la retournant comme une crêpe, entreprit de lui dévorer le visage.

***

Pendant ce temps, les ours à qui appartenait la maison avaient fini de faire leur promenade avant le dîner et ils rentraient chez eux. Dès qu’ils eurent poussé la porte, ils sentirent que quelqu’un était venu et ils se mirent à fouiller dans la pièce en reniflant partout…

Lisa-Beth interrompit sa lecture et demanda à l’assistante maternelle : « Oui, qu’est-ce qu’il y a, Raïssa ? »

La dame répondit : « C’est juste pour vous dire que Nicolas n’est pas là aujourd’hui et que sa mère n’a pas téléphoné pour prévenir ou l’excuser. Vu le cas que c’est cette fille-là, je serais vous je lui collerais les services sociaux au cul, passez-moi l’expression… »

Lisa-Beth se mordit les lèvres : elle avait autre chose à faire ce jour-là qu’encore plus de paperasserie. Aussi répondit-elle : « Mais vous n’êtes pas moi, Raïssa. Et on ne va pas faire venir la police à chaque fois qu’une parente a un pet de travers et garde son enfant à la maison. Mais merci quand même. »

Et au même moment, dans un collège voisin, la Conseillère Principale d’Éducation criait depuis son bureau : « La petite Chloé, ses parents ont prévenu qu’elle serait absente aujourd’hui ? »

On lui cria de l’accueil de la Vie Scolaire la réponse négative, et la jeune femme cliqua sur son écran en soupirant : « Alors j’envoie un S.M.S. à ses parents. Qu’est qu’ils nous auront fait chier ceux-là ! »


LA FIN DANS LE MONDE

Tous droits réservés David Sicé, achevé le 18 août 2016.

Source de l'illustration libre de droits: https://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:U ... _grand.jpg

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Re: Le Marathon d'Halloween 2016

Messagepar Greenheart » Sam 29 Oct 2016 21:13

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Pour servir les Morgans…


Une atroce nouvelle dystopique à se raconter tard le soir d'Halloween.
...de David Sicé.



Pour adultes et adolescents.

Les Morgans et leurs enfants habitaient une superbe maison blanche à colonnade au milieu d’un grand jardin, avec une grande pelouse devant, bien verte et parfaitement taillée, comme jamais on en n’avait vu. Jimmy, Nikki, Julia, Vincent et moi, on ouvrait de grands yeux tandis que le minibus franchissait l’immense portail et avançait lentement jusqu’au bout de l’allée pour se garer devant le perron.

Nous savions que les Morgans étaient gros, et leurs enfants aussi – leur bonne l’était aussi : Bonnie nous attendait au bas du perron, l’air réjouie quoi qu’un peu déçue : « Vous n’en avez trouvé que cinq ? » elle s’étonnait. Et le chauffeur de la maison, Samuel expliqua que c’était la fin de la semaine et que l’Internat ne serait réapprovisionné que samedi. Le visage de Bonnie s’éclaira : « Dieu soit loué, avec ces invités que nous avons pour le week-end, je ne vois pas comment nous aurions pu y arriver ! »

Puis la bonne nous passa en revue, à pas lourds et en nous pinçant les joues et en vérifiant si nos ongles étaient propres et si nous n’avions pas de poux. Elle s’exclama : « Mes pauvres chéris, comme vous êtes maigres ! Vous devez mourir de faim ! » Tout en nous faisant signe de la suivre, elle ajouta avec un bon gros sourire : « Suivez-moi : je vous ai préparé un brunch ! »

Bonnie nous amena à l’office, devant une très longue table chargée de nourriture : « Prenez votre assiette et servez-vous autant que vous voulez, les couverts sont au bout avec le chocolat, le thé, le café, les jus de fruits, de la limonade et les sodas. Mangez tout ce que vous voulez – mais pas trop à la fois, sinon vous allez être malades et vous ne pourrez plus travailler ! »

Comme Jimmy allait pour se servir, Bonnie l’attrapa par le bras et lui donna une petite tape sur le dos de la main : « Mais où sont vos bonnes manières, jeune homme ? Avant de manger, il faut se laver ! » Et elle nous mena à l’immense salle d’eau du personnel où étaient préparés des savonnettes, des serviettes, et huit brosses à dents toutes neuves. Bonnie en ramassa trois en grimaçant, puis se retourna vers nous, tout sourire : « Ai-je besoin de vous apprendre comment on se brosse les dents ? Chaque fois après manger, on frotte du rouge vers le blanc bien tranquillement, bien partout et pendant une bonne minute toute la bouche ; et avec le dos, on finit en frottant gentiment la langue, comme… tha ! »

En parlant elle avait mimé tout ce qu’elle disait avec une brosse à dents encore emballée. Les dents de Bonnie étaient magnifiquement plantées et toutes saines, et elle avait une grande langue bien rose comme il faut. Devant notre air éberlué, Bonnie éclata de rire : « Ce que vous êtes adorables ! » déclara-t-elle en nous ébouriffant chacun les cheveux et en nous envoyant l’un après l’autre nous laver les mains, là aussi, en frottant bien, sans oublier entre les doigts et le bout des doigts, et en utilisant les brosses à ongles pour les ongles. Comme pour les brosses à dents, elles étaient chacune de couleur différente, et on devait garder la même couleur que pour la brosse à dents. Nous avions très faim.

En quittant la salle d’eau, Bonnie précisa : « Après chaque pièce, nous redescendons nous laver, manger un petit quelque chose, et nous repassons par la salle d’eau pour nous laver et nous brosser les dents, car être propre, c’est important. Si vous avez la petite ou la grosse commission à faire, vous devez attendre que nous descendions tous ensemble à la salle d’eau : comme vous avez pu le voir, nous avons plus que de pots que nécessaire derrière toutes ces jolis portes de couleur pour que vous y alliez tous en même temps, et un papier très doux pour bien vous essuyer. Utilisez autant de feuilles que nécessaire, et n’oubliez pas d’utiliser la douchette et le savon pour bien vous nettoyer tout ce qu’il faut ! Et bien sûr, il faudra vous laver les mains à nouveau – avant de vous brosser les dents ! »

Bonnie nous laissa enfin nous servir, et le ménage commença, pièce après pièce, sous sa direction constante et exigeante. Comme elle le répétait, c’était bien pratique d’être petit pour bien enlever la poussière partout sous les meubles et le long des plinthes. Le travail ne durait vraiment pas longtemps – nous n’avions pas le temps de nous essouffler, ni même de nous fatiguer. Cela aurait pu même à un jeu si chaque pièce n’avait pas été si vaste, lumineuse et luxueuse.

Alors que je ressortais à reculons de dessous le lit, j’entendis une grosse voix de femme parler à Bonnie : « Comme ils sont maigres ! Vous leur avez donné à manger au moins ? » Je l’aperçus une fois sorti de dessous du lit, comme je me relevais, vivement, ma balayette et ma pelle à la main, tremblant comme une feuille : si grande, avec un chignon, un triple menton et des bourrelets partout, un chemisier, un pantalon et des sandales blanches, une ceinture lamée, et des boucles et des bagues en or, et un collier de perles qui s’entrechoquaient constamment sur son énorme poitrine rebondie… Je restais médusé. Madame Morgan – je l’avais reconnue de suite parce qu’elle était sur toutes ces photos et sur le grand portrait de la petite famille dans le hall de la maison – me regarda rapidement de bas en haut, en reniflant, puis s’en alla, les talons de ses sandales claquant sur les tapis du couloir. « Allez, allez, l’heure tourne ! » rappela Bonnie.

En fait, c’était surtout à l’heure que pensait la bonne, et pas tant que cela au ménage : j’avais laissé exprès un gros mouton sous le lit, et elle ne vérifiait même pas. Comme j’en faisais la remarque aux autres, Nikki déclara qu’elle, elle faisait le ménage pour de vrai avec sa mère, et ici il n’y avait presque rien à faire. Julia lui répondit que forcément, puisque c’était Bonnie qui le faisait avec eux : ils ne faisaient que les détails, les choses qui demandaient de se baisser. Et Julia ajouta, perfide, que Bonnie devait avoir bien mal au dos en faisant le ménage, vu qu’elle était si grosse. Tommy donna alors un petit coup de coude à Julio, car Bonnie revenait de sa discussion avec la cuisinière, qui les regardaient encore depuis la porte de la cuisine. Bonnie annonça « Allez, vite, vite, allons-nous laver les mains et nous brosser les dents… » Et de préciser, d’un air gourmand : « Il ne nous reste plus qu’une pièce à faire ! »

Et de retour d’un vaste bureau où rien ne traînait, et où toutes les livres dans les étagères étaient parfaitement alignés, Bonnie déclara, comme nous nous rendions à la salle d’eau : « Comme je suis fière de vous, mes petits, vous avez très bien travaillé. Maintenant vous allez vous laver les mains, faire la grosse commission, et prendre un bon bain chaud, et je laverai vos cheveux. Surtout ne remettez pas vos vêtements sales après, nous avons ici les peignoirs de votre couleur. Puis nous irons dans la cuisine, où vous attend une grande surprise ! »

AAAAAAAAAAAAAAHHHHHH!!!!
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Re: Le Marathon d'Halloween 2016

Messagepar Greenheart » Lun 31 Oct 2016 12:08

Comment se termine vraiment les contes de fées – La suite.

Une série de petits contes très horribles racontés tels qu'ils se sont vraiment passés, si, si ! par David Sicé.

Pour adultes et adolescents.

Blanche Neige

En fait cela ne s’est pas du tout passé comme les nains l’ont raconté, et pour cause.

C’était la veille de la Saint-Jean, et Blanche-Neige avait effectivement profité de l’absence de sa belle-maman partie à son sabbat de sorcière pour prendre la fuite par la forêt, et était arrivée devant la maison des sept nains, dont elle connaissait parfaitement l’existence.

Mais la jeune fille n’avait aucunement l’intention de servir de bonne à tout faire à une bande de mineurs et encore moins de partager leur lit : elle comptait seulement leur soutirer quelques provisions en les menaçant de mauvais tours s’ils ne s’exécutaient pas ; alors elle pourrait reprendre sa route et croiser le jeune prince d’un royaume voisin afin de le séduire en lui racontant une histoire triste et en faisant glisser la bretelle de sa lingerie fine le long de son épaule nue, tout en lui faisant trouver un petit bleu qu’elle prétendait s’être fait quelque part le long de sa cuisse.

Mais à cause de ces stupides nains, le plan de Blanche-Neige ne se passa pas du tout comme prévus : les nains savaient pourtant bien que le jour d’Halloween il fallait tenir prêt toutes sortes de friandises et de douceurs, mais la seule chose que Simplet trouva quand Blanche-Neige frappa à leur porte, c’est une vieille pomme d’amour toute molle et toute collante, dans laquelle aucun d’entre eux n’aurait voulu mordre.

Qu’importait cependant pour Blanche-Neige, qui accepta le cadeau même pas empoisonné car elle avait très faim, et mordit dedans sans même attendre d’avoir quitté le seuil de la charmante petite chaumière des nains. Alors ceux-ci horrifiés virent Blanche-Neige devenir toute rouge, battre des bras, pointer un doigt accusateur, puis s’écrouler, étouffée par la pomme pourrie d’amour qui lui avait collé au gosier, bloquant sans faillir toute arrivée d’air et surtout toute protestation.
Soulagés de voir défaillir l’inopportune visiteuses, les nains d’un seul élan emportèrent Blanche Neige dans une clairière voisine où ils pourraient l’abandonner discrètement et laisser les gentils animaux de la forêt la dévorer à leur aise – mais c’était sans compter le jeune Prince qui les surpris alors qu’il était occupé à chasser les gentils animaux de la forêt pour le sport.

Fort heureusement, Simplet avait tressé une couronne de fleurs pour la pauvrette étouffée, et du coup, Prof et les autres brodèrent une faribole selon le goût des frères Grimm, qui leur avait extorqué de la bonne soupe et quelques cailloux d’allures précieuses quelques jours plus tôt après qu’ils se soient perdus dans la forêt alors qu’ils étaient en route pour le village voisin, afin de dépouiller quelques pauvres vieilles de leurs droits d’auteurs.

Très ému par la beauté de Blanche-Neige, dont les lèvres rouges devenaient franchement violette, et assuré qu’elle était vierge et ne risquait pas de revenir à elle, le jeune Prince vit l’occasion idéale de tremper son ennui sans risquer d’avoir à rendre quelques comptes à certains parents. Mais il ignorait alors que ce faisant, il allait inventer avec quelques siècles d’avance la méthode Heimlich : Blanche-Neige recracha la pomme et revint promptement à elle, reconnut instantanément son sauveur, et réclama – et surtout obtint le mariage, prenant les sept nains à témoin et menaçant le jeune homme de voire tomber quelque tendre mais parfois dure partie de son anatomie si jamais sa sorcière de belle-mère avait vent de la mauvaise affaire.

Et elle fut très heureuse et eut beaucoup d’enfants, pas forcément tous de son prince.

NOOOOOOON !!!!

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