L'homme à l'oreille cassée (1862)

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L'homme à l'oreille cassée (1862)

Messagepar Greenheart » Sam 3 Jan 2015 19:21

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Attention, ceci est la couverture d'une édition abrégée.

De Edmond About.

Juin 1859. Léon Renault, le fils du professeur de Physique Chimie à la retraite Jean Renault est de retour à la maison. Il ramène des cadeaux pour tout le monde, parmi lesquels un objet qu'il croyait faire partie de la collection Humbolt et qui s'est avéré être une momie d'un colonel de l'armée de Napoléon, victime d'une expérimentation du professeur Jean Meiser de Dantzig. Ce professeur croyait pouvoir retirer l'eau du corps humain sans tuer la personne. Clémentine, la fiancée de Léon, persuade celui-ci de tenter de ranimer la momie, et contre toute attente, le Colonel Fougas se réveille, en pleine forme... mais ignorant tout de sa nouvelle époque.

***

Edmond About a écrit:Le 18 mai 1859, M. Renault, ancien professeur de physique et de chimie, actuellement propriétaire à Fontainebleau et membre du conseil municipal de cette aimable petite ville, porta lui-même à la poste la lettre suivante :
"A monsieur Léon Renault, ingénieur civil, bureau restant, Berlin, Prusse.
"Mon cher enfant,
"Les bonnes nouvelles que tu as datées de Saint-Petersbourg nous ont causé la plus douce joie..."


Ici le texte intégral dans le domaine public :

http://fr.wikisource.org/wiki/L%E2%80%9 ... ass%C3%A9e
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Re: L'homme à l'oreille cassée (1862)

Messagepar Greenheart » Lun 20 Nov 2017 14:40

Un chapitre supplémentaire a été apparemment écrit en 1893.

L'intéressant site Archeosf le reproduit ici intégralement : http://archeosf.publie.net/chronique-18 ... le-cassee/

Et okazou la page deviendrait subitement inaccessible...

Paul Giniety, in Le XIXe Siècle, n° 7765, 19 avril 1893 a écrit:Comme le bon colonel Fougas, après toutes les émotions qu’il avait éprouvées en se trouvant tout à coup, au sortir de sa merveilleuse léthargie, transporté, lui, le héros de 1813, au Gymnase, en plein Paris de 1893, se sentait très fatigué, il demanda la permission de faire un somme.

L’homme à l’oreille cassée reposait sur un canapé, et ce brave, qui venait en si peu de temps d’apprendre tant de choses effarantes pour un soldat de la Grande-Armée, goûtait la douceur d’un vrai sommeil. Il ne laissait pas, cependant, d’être agité de quelques rêves. On a beau être bronzé sur tout, il y a de quoi être troublé quand, en quelques minutes, il faut revivre quatre-vingts ans d’un coup.

Le docteur Ladoucette le contemplait avec un intérêt de savant et de philosophe.

— Tout de même, dit-il à son neveu Léon Aubertin, le pauvre colonel a-t-il bien été réveillé au bon moment ? Ne sera-t-il pas en droit de regretter amèrement son époque, en considérant la nôtre, celle où nous l’avons ressuscité ?… Nous, nous y sommes faits, et nous la suivons même avec une certaine curiosité ; mais, pour un gaillard comme lui, je crains qu’il n’y trouve pas d’agrément, car, enfin, il est médiocrement gai, notre temps.

— Ma foi, mon oncle, fit Léon, j’étais précisément en train de me faire les mêmes réflexions. Bien que, en ma qualité d’ingénieur, j’aie l’esprit positif, je suis capable de sensibilité. Il va effroyablement s’ennuyer, ce hussard conquérant, au milieu de l’universelle médiocrité actuelle.

— Oui, il aurait été plus charitable d’attendre encore un certain nombre d’années pour lui rendre la vie. Nous avons agi en égoïstes, nous avons été trop pressés.

— Alors ?…

— Alors, les instructions du professeur Frantz Nibor sont toujours là, et le bocal où le colonel laissait passer le temps est en bon état. Rien ne serait plus aisé que de se livrer de nouveau à l’opération de son dessèchement et à le retransformer en momie.

— Pour combien de temps ?

— Mettons pour cent ans. Le monde marche assez vite, malgré tout, et il faut supposer que tout ce qui est encore à l’état de germe aura victorieusement éclos et que la société de cette période-là vaudra mieux que la nôtre.

Sans qu’il s’aperçût de rien, toujours endormi, le colonel fut placé sous une cloche semblable à celle qui avait servi aux merveilleuses expériences du professeur Nibor. Grâce aux progrès de la science, le docteur Ladoucette disposait d’instruments plus perfectionnés, qui hâtèrent la métamorphose du brave Fougas. En un instant, réduit à l’état de parchemin , les fonctions vitales étant suspendues mais non brisées (le système du professeur Nibor était décidément admirable !), le colonel se retrouva dans l’état où il était resté si longtemps avant que Léon Aubertin le découvrit chez un brocanteur de Munich.

Le docteur envoya la momie du colonel, dans une grande caisse, à l’Académie de médecine, avec cette inscription :

« Fragile. À ouvrir en 1993 ». Un pli cacheté accompagnait l’envoi : il contenait les indications nécessaires, destinées aux savants du vingtième siècle, pour un nouveau réveil de Fougas.

— Je crois, dit Ladoucette à son neveu, que nous avons agi honnêtement. En 1993, le colonel aura la chance de jouir d’une transformation plus complète du monde, et plus consolante.

Sur quoi, avec la satisfaction du devoir accompli, il vaqua dès lors tranquillement à ses occupations. Il en avait beaucoup, car les médecins, faute de mieux, avaient réussi à découvrir une quantité de maladies nouvelles.

Le temps se passa. Des choses et des choses s’accomplirent. On avait même démoli les bâtiments de l’Académie de médecine pour installer l’illustre compagnie dans un palais digne d’elle, mais les présidents qui s’étaient succédé avaient tous pris grand soin du précieux colis.

Un siècle s’écoula. Le moment vint de ressusciter, selon les vœux de Ladoucette, l’étonnant colonel. C’était justement l’arrière-petit-fils du docteur qui présidait alors l’Académie. Il voulut accomplir lui-même l’opération menée à bien, cent ans auparavant, par son aïeul.

Elle réussit à merveille.

Fougas éternua fortement, regarda avec un légitime étonnement la compagnie assemblée, cherchant à rappeler ses souvenirs, et dit :

— Qu’est-ce qu’il y a encore ?

Il commençait, le colonel, à être agacé des libertés qu’on prenait à son égard.

En homme qui a déjà l’habitude de l’imprévu, il reprit tôt sa présence d’esprit, cependant.

— Je parie qu’on m’a fait une nouvelle farce ! s’écria-t-il en s’étirant. Il hésita un instant, comme par crainte de passer pour un simple soudard ; mais la tentation fut plus forte que tout, et, comme la première fois, il demanda l’Annuaire.

— Il n’y en a plus, lui répondit-on.

— Comment ! il n’y en a plus ?

— Dame, puisqu’il n’y a plus d’armée. C’est vrai, vous ne pouvez pas savoir. Les peuples ont fini par s’aviser qu’il y avait mieux à faire que de s’entretuer, et on a procédé au désarmement général. On s’en trouve même fort bien, et l’arbitrage, auquel se soumettent les diverses républiques européennes, suffit à résoudre toutes les difficultés.

— Ça, par exemple, c’est fort ! s’écria Fougas, abasourdi. Mais comment gardez-vous les grandes villes, quand il y a des troubles ?

Les journaux qu’il avait lus chez le docteur Ladoucette, en 1893, étaient pleins de récits d’événements violents.

— Des troubles ? Pourquoi y en aurait-il avec notre nouvel état de choses, qui a supprimé les causes des haines sociales ? On a mis du temps à arriver à l’apaisement général, mais on y est arrivé tout de même, avec la bonne volonté de tous. C’était la féroce, l’incroyable inégalité des conditions, l’impossibilité, pour un trop grand nombre d’hommes, de sortir d’un abîme de misère, qui les provoquaient, ces plaintes. Grâce au ciel, la justice n’est plus seulement un mot, comme autrefois. Allez dans la rue, vous n’y rencontrerez plus de ces loqueteux sinistres pour qui tout était sujet de désespoir ; on a heureusement proclamé, et autrement que par des phrases, le droit à la vie pour tout le monde.

— Ça, dit Fougas, c’est encore plus fort !

— Le travail assure à chacun son pain pendant les années de vigueur, et de sages institutions prévoyantes font qu’on parvient sans crainte à la vieillesse. La science, quand vous vous êtes réveillé pour la première fois, était encore en enfance.

— J’ai vu, en effet, alors, d’étranges machines.

— Oui, mais elles compliquaient l’existence, encore plus qu’elles ne la soulageaient vraiment. À présent, elles sont exactement les servantes de l’homme, elles ont tout simplifié merveilleusement, et les tâches pénibles, rebutantes et dégradantes, ce sont elles qui les accomplissent. On peut enfin jouir de la vie, pleinement et largement, d’autant que tout ne s’achète plus, comme naguère, avec de l’argent. On l’a fort remise à sa place, l’insolence de l’argent.

— Extraordinaire ! murmura Fougas. Et, alors, il n’y a plus de mécontents ?

— Ah ! dit en souriant le petit-fils de Ladoucette, il y a encore une demi-douzaine d’excentriques, très peu convaincus d’ailleurs, qui, par genre, affectent de se tenir à l’écart, de ne pas confier leurs réclamations à la commission des vœux publics, fonctionnant pourtant à la satisfaction générale, étudiant les justes désirs populaires qui, jadis, avec l’embrouillé système gouvernemental de nos aïeux, attendaient si longtemps leur réalisation ! Mais tout le monde rit d’eux !

Il y a très longtemps qu’a été enterré le dernier vrai pessimiste. Voyez si, nous autres, nous avons l’air le moins du monde mélancoliques !

— C’est vrai, dit Fougas. Alors, en ces cent années, tout ce qu’imaginaient à peine mes amis de 1893, qui étaient de singuliers pistolets, vous l’avez rendu, pratique ?

— Goûtez seulement un peu à notre existence, colonel !

Mais voilà. Cette continuation à l’histoire de l’homme à l’oreille cassée n’est que du domaine du rêve. La concorde, la justice absolue, la pitié, la vraie fraternité, — est-ce que cela sera toujours du rêve ?
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