Jeune Afrique a écrit:Sans doute faut-il être indulgent avec le scénario, qui a pour ambition de lancer la série. Il tient en quelques lignes : héritier du trône après l’assassinat de son père, T’Chaka, T’Challa rentre chez lui et prend la tête d’un pays dont l’équilibre est menacé...
(l'absence d'humour, exotisme qui craint) Alors au lieu de planter sa caméra dans les majestueuses gorges d’Oribi, en Afrique du Sud, le réalisateur a fait construire les décors en studio, à Atlanta. En particulier des cascades de onze mètres de haut où circulaient en boucle quelque 500 000 litres d’eau. Passons sur le gaspillage, mais ces kilos de carton-pâte accumulés sont une vraie douleur pour les yeux. Douleur que des tartines d’effets numériques mal contrôlés ne peuvent malheureusement effacer. Et, entre les scènes tournées sur les fausses chutes d’eau et celles filmées dans des serres tropicales dont le sol avait été préalablement tartiné de terre rouge, difficile de dire lesquelles sont les plus pénibles à regarder…
Les tenues folkloriques et les coiffures colportent une vision stéréotypée, pour ne pas dire ridicule, de l’Afrique
D’accord, disons qu’il ne s’agit que d’un décor. Et les Wakandais, alors ? Dans ce pays qui offre à son roi une très érotique combinaison fourrée au vibranium, le peuple a droit à un gloubi-boulga de tenues folkloriques empruntées à toutes les supposées traditions du continent. Coiffures vaguement zouloues, tenues vaguement masaïs, peintures corporelles vaguement oromos, scarifications rituelles, plastrons en métal et colliers de perles, motifs chatoyants et bigarrés garantissent une absence totale d’unité et, plus grave, colportent une vision stéréotypée, pour ne pas dire ridicule, de l’Afrique.
Une sensation accentuée par les terribles scènes de chamanisme au cours desquelles T’Challa et Killmonger entrent en contact avec leurs ancêtres. Après avoir été ensevelis sous quelques kilos de latérite tamisée, ceux-là retrouvent leurs ancêtres dans un monde psychédélique où le soleil – à moins qu’il ne s’agisse d’aurores boréales conçues sous psychotropes – se couche derrière d’incontournables acacias…
Que propose donc Black Panther (en manière de message politique) ? Rien, à l’exception de deux lignes de dialogue démagogiques sur le pillage des œuvres cultuelles par les puissances coloniales. Si certains avancent avoir vu dans l’affrontement entre T’Challa et Killmonger un remake de l’opposition entre Martin Luther King et Malcolm X, c’est qu’ils ont sans doute beaucoup d’imagination. Quant à l’idéal démocratique du Wakanda, pas sûr qu’il représente vraiment les aspirations des peuples africains : lorsqu’un nouveau roi doit être couronné, quiconque peut le défier en combat singulier. Le plus violent remporte le trône… Cela vous rappelle quelque chose ?
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